La Justice attachée de presse involontaire de Le Pen



Jean Marie Le Pen tient parfois ses promesses. En octobre de l'année dernière, il avait clairement menacé différents journaux des foudres de la Justice s'ils comptaient continuer à qualifier son parti "d'extrême droite". Une menace qui participe d'une stratégie pour le moins payante.

S'appuyant en effet sur la très célèbre loi sur la presse de 1881, stipulant que toute personne mise en cause dans la presse peut exiger un Droit de Réponse en lieu et place de l'article publié, il vient de s'offrir, dernièrement, deux tribunes de prestige chez nos confrères du Monde et de Libération. Inutile de préciser que les quotidiens en question, obligés d'appliquer les ordonnances de référé demandées par le leader du FN, ne digèrent pas cette utilisation détournée du Droit français.

Il est évidement hors de question de remettre en cause le Droit de Réponse qui garantit les citoyens et les personnes morales contre les errements de certains journalistes, la Presse n'ayant pas à s'ériger en pouvoir absolu et inattaquable. Mais, en accordant automatiquement un Droit de réponse au Front National, la Justice ne risque t-elle pas de détourner le principe même de ce droit - qui consistait pour une personne à tenter de rétablir une vérité potentiellement bafouée - en offrant à un parti une tribune sans précédent pour banaliser son image. Aujourd'hui, le FN n'a plus recours aux attaques en diffamation longues et incertaines, mais joue la carte, sans souci, du Droit de Réponse.

Alors que faire ? Soit continuer à écrire que Jean Marie Le Pen dirige un parti d'extrême droite au risque d'être forcé d'insérer à chaque fois en lieu et place un droit de réponse du FN, ou bien trouver un nouveau terme désignant cette opinion politique pour le priver, ainsi, de ce qui pourrait devenir un de ses meilleurs alliés : le droit de réponse.

Retour Index



CapturΘ par MemoWeb α partir de HTTP://www.pratique.fr/magnet/I110696.html le 24/11/96